Autodidacte et passionné, Weisberg est aujourd’hui reconnu comme l’un des maitres de l’art non-officiel soviétique des années 60-70. Bien que son travail se soit toujours distancié du « Réalisme social » attendu des autorités, Weisberg devient membre de l’Union des Artistes de l’URSS à la fin des années 60, statut qui lui permet de travailler et de recevoir des commandes de l’état.

L’artiste passera sa vie à questionner la place de la couleur dans sa peinture. Après sa participation à l’exposition avant-gardiste du Manège en 1962, Weisberg se lance dans une recherche artistique du Blanc sur Blanc et devient le peintre de l’invisible, le Giorgio Morandi Russe. Les nuances de blancs et les gris révèlent les volumes mis en lumière grâce à une multitude de petites touches vibrantes dévoilant silencieusement les formes dépolies des objets émergeant d’un brouillard énigmatique.

Sa première exposition personnelle a lieu à Paris en 1984, un triomphe auquel l’artiste n’assiste pas par peur des représailles politiques. En URSS, la première exposition personnelle de l’artiste n’aura lieu que trois ans après sa mort, en 1988.

– Acquis auprès de l’artiste.
– Collection de M.X
– Collection particulière

Chu Teh-Chun par Jean-Pierre Rémy, Edition de la différence, Paris 2006, reproduit p.132

Dès 1958, Michel Ragon, jeune critique et militant actif de l’abstraction, remarque Chu Teh Chun qui expose dans les galeries parisiennes aux côtés de Sugaï, key Sato, Francis Bott, Doucet, Corneille… La galerie Legendre, dirigée par Maurice Panier, lui propose cette année-là un contrat exclusif de six ans. Son directeur écrit à propos de Chu : « Son point de départ est le plus souvent des paysages ou les strophes d’un poème (chinois ancien) qu’il traduit en langage plastique ».

Combinant la délicatesse et la spiritualité de l’esthétique asiatique avec l’éclat et l’ardeur de l’abstraction moderne, Chu Teh Chun développe cette forme si spécifique d’abstraction qui semble étonnamment occidentale aux Chinois et si curieusement asiatique aux occidentaux…

Chu Teh-Chun s’inspire également des maîtres anciens. En 1970, il se rend à Amsterdam pour assister à la rétrospective des 300 ans de la naissance de Rembrandt. Littéralement subjugué par l’utilisation du clair-obscur et cette virtuosité à manier les noirs et leurs indissociables blancs, il est aussi fasciné par l’extraordinaire intensité des ors, des bruns et des rouges sombre. Pour Chu, Rembrandt exprime au travers de sa peinture les deux principes fondamentaux d’action et de réaction de la cosmologie chinoise : le yang, lumière et chaleur et le yin, obscurité et humilité se combinant de manière complémentaires et contradictoires.

Notre tableau, le 6 mai 1977, se compose de tonalités majoritairement ocres, rouges et orangés mêlées à un blanc lumineux fusionnant avec le noir. La palette s’éclaircit au centre de la composition pour laisser éclater un flamboiement tumultueux de touches claires ponctuées d’éclaircies de lumière. Une lueur jaune irradie dans l’obscurité inquiétante d’un brun chaud marié à un rouge flottant.

Sa technique est unique et le mouvement de son pinceau est sinueux et sensuel. La trace des gestes courbes de Chu transparaît sur la toile et les formes coulent, intuitives et musicales. Chu élabore un langage complexe en cherchant à dompter les mouvements de la lumière. Il superpose savamment les couches d’huile, révélant par des effets de transparences diaphanes des lueurs incandescentes. Il n’y a pas de vide dans son œuvre qui exploite intensément l’espace plein.

La fusion des traditions européennes et chinoises fait de Chu Teh-Chun l’un des artistes chinois les plus importants de la fin du XXe et du début du XXIe siècle.

Ancienne collection Weiss (Paris).

-1956, Paris, Galerie Bing, Serge Poliakoff du 9/10 au 1/11/ 1956.

-Catalogue raisonné de Serge Poliakoff, Tome II, 1955-1958, par Thaddée et Alexis Poliakoff, Editions Galerie Française (Munich), illustré sous le n° 56105 p.154, répertorié sous le numéro d’archives n° 856021.

Serge Poliakoff est un peintre de nationalité russe dont la branche paternelle est Kirghize, sa mère profondément religieuse l’entraîne tous les jours à l’église et la spiritualité des icônes imprègne profondément le jeune artiste. Après des études à l’école du dessin de Moscou, sa famille quitte la Russie lors de la révolution de 1917. Ses relations personnelles avec Kandinsky, les Delaunay, Freundlich le conduisent à abandonner la figuration au cours des années 40 et il sera bientôt l’un des acteurs principaux de l’école de Paris et du mouvement abstrait de l’après-guerre.

En 1947, il peint à Gordes, entraîné par Jean Deyrolle en compagnie de nombreux de ses amis comme Schneider, Gilioli, Vasarely, Dewasne, éminents représentants de l’abstraction.
Poliakoff recherche un équilibre entre formes et couleurs : l’emboîtement subtil des surfaces suggèrent à l’œil une vibration optique non pas fondée sur la géométrie mais sur une mosaïque chromatique variée à l’infini. Comme ici, les surfaces s’assemblent autour d’arcs adoucis ou au contraire d’angulations agressives et les couleurs se teintent des nuances de l’âme russe tantôt joyeuses tantôt profondément mélancoliques.

Raoul Dufy, Catalogue Raisonné des aquarelles, gouaches et pastels, par Fanny Guillon-Laffaille, Tome II, Editions Louis Carré et Cie, Paris, 1982, illustré sous le n° 1150 p. 34.

En 1922, Dufy effectue un voyage en Italie.
La Sicile l’inspire particulièrement en raison de l’intensité du soleil méditerranéen et de la puissance qu’il confère aux couleurs. Il réalise de somptueuses aquarelles qu’il associe par leurs titres au récit d’Ulysse dans l’Odyssée.
Raoul Dufy disait que l’aquarelle lui offrait de « plus grandes possibilités en matière d’improvisation » car, grâce à son utilisation très rapide « la transition entre les couleurs s’effectue déjà par le blanc du papier ».

Pour suggérer les flots, Dufy utilise des touches pointillées ou virgulées, le pinceau s’enjoue ainsi en sinuosités et volutes. Dans le catalogue de Fanny Guillon-Lafaille, plusieurs aquarelles reprenant ce thème et cette technique virtuose sont répertoriées. Au-delà de ses sujets traditionnels (paysages, scènes d’intérieur, orchestres), Dufy sait prendre un parti pris totalement moderne où le geste résume les formes en signes et symboles.